Alors qu'un amendement visant à mieux informer les consommateurs sur la nature des produits alimentaires servis dans la restauration a été déposé par le député UMP Fernand Siré, les lobbies de l'industrie agroalimentaire et ceux de la restauration industrialisée commerciale et collective sont à l'œuvre pour empêcher la mise en place d'une législation qui ferait de la France le premier pays au monde où tous les clients de restaurants seraient informés sur le contenu de leurs assiettes.
Resto : savoir ce qu'il y a dans nos assiettes ?
L'amendement sur la transparence dans la restauration, qui lève un tabou, est en train d'être torpillé par les syndicats de restaurateurs avec l'appui du gouvernement.
Sur le papier, tout le monde est d'accord : « Les consommateurs ont droit à une information transparente », répète Frédéric Lefebvre, secrétaire d'Etat en charge à la fois de l'Artisanat, du Commerce… et de la Consommation.
Aujourd'hui, seule la provenance des viandes est obligatoire : le client d'un restaurant n'a qu'à se fier à son petit doigt pour savoir si le hachis parmentier a été fabriqué dans les usines Davigel et simplement passé au micro-ondes ou si le restaurateur a acheté des pommes de terre, du bœuf, des oignons… et cuisiné la recette sur place.
Un amendement « tout simple »
Aucune loi n'interdit de se dire restaurateur sans rien connaître à la cuisine. Ce n'est plus le cas pour les boulangers : depuis 1998, celui qui ne pétrit pas sur place n'a droit qu'à l'appellation « dépôt de pain ». Aucune loi n'interdit non plus d'indiquer sur sa carte que la tarte aux pommes est « maison » alors qu'elle a été achetée chez Metro et fabriquée dans les usines Pasquier.
Le consommateur a droit à une foultitude d'infos sur les étiquettes des boîtes de conserve et de tout ce qu'il achète au supermarché, mais toutes ces étiquettes finissent dans la poubelle du restaurateur, qui n'a plus qu'à ajouter un brin de persil ou un filet de caramel pour donner l'impression que les plats sortent de ses fourneaux. C'est cette gigantesque « arnaque » que le restaurateur Xavier Denamur traque depuis des années.
Fernand Siré, député UMP et médecin, est issu d'une famille de restaurateurs. Le 4 octobre 2011, il a déposé un amendement dans le cadre d'une loi sur la consommation. L'élu nous raconte avoir voulu faire un « texte tout simple », le bon sens même :
« Que le consommateur sache si les plats sont élaborés sur place et si les produits sont frais. »
Il s'est ensuite rendu compte qu'« il ne faut pas rendre la carte trop complexe. Une avalanche d'infos pourraient dégoûter le consommateur ».
Pour Xavier Denamur, il y a moyen de faire simple :
« Les restaurateurs réalisant entièrement leurs plats dans leurs cuisines à base de produits bruts et frais pourraient revendiquer la mention “cuisine maison”. Les fromages, charcuteries, poissons fumés, pains, viennoiseries, les condiments, les glaces et les pâtes sortiraient du champ d'application. Une dérogation permettrait l'utilisation de poissons, viandes, crustacés congelés à condition que cela soit signalé. »
Il imagine un pictogramme pour le « fait maison » et un autre pour la « nourriture industrielle », ce qui veut dire que le plat peut contenir des additifs chimiques, des épaississants, des stabilisants, des colorants, des agents de sapidité. La liste de tous les ingrédients et ajouts devrait être à disposition des clients. Des précisions sur la provenance des produits (local, AOC, bio, poisson sauvage ou d'élevage) pourraient aussi être apposées.
Le consommateur aura-t-il encore envie de payer une douzaine d'euros un plat acheté 2 euros sous vide, congelé, ou en boîte ? La réponse est dans la question...
rue89